2 Septembre.
Dans ce moment même je commence à dessiner quelque chose pour vous; et je vous l’enverrai peut-être dans cette lettre – savez vous, chère amie, comment je vous écrirai – par moments! – une lettre durera quelquefois plusieurs jours, – une pensée me viendra-t-elle je l’inscrirai; quelque chose de remarquable se gravera-t-il dans mon esprit – je vous en ferai part – êtes-vous contente de ceci? –
Voilà plusieures semaines déjà que nous sommes séparés, peut-être pour bien longtemps, car je ne vois rien de trop consolant dans l’avenir, et pourtant je suis toujours le même, malgré les malignes suppositions de quelques personnes que je ne nommerai pas. – Enfin, pensez vous que j’ai été aux anges de voir Наталью Алексеевну, parce qu’elle vient de nos contrées; – car Moscou est et sera toujours ma patrie. – J’y suis né, j’y ai beaucoup souffert, et j’y ai été trop heureux! – ces trois choses auraient bien mieux fait de ne pas arriver… mais que faire!
Mademoiselle Annette m’a dit qu’on n’avait pas effacé la célèbre tête sur la muraille! – pauvre ambition! – cela m’a réjoui… et encore comment! – cette drôle passion de laisser partout des traces de son passage! – une idée d’homme, quelque grande qu’elle soit vaut-elle la peine d’être répétée dans un objet matériel, avec le seul mérite de se faire comprendre à l’âme de quelques-uns; – il faut que les hommes ne soient pas nés pour penser, puis qu’une idée forte et libre est pour eux chose si rare! –
Je me suis proposé pour but de vous enterrer sous mes lettres et mes vers; cela n’est pas bien amical ni même philantropique, mais chacun doit suivre sa destination.
Voici encore des vers, que j’ai faits au bord de la mer: